Bible et données historiques : l’utilisation de la Septante dans le Nouveau Testament

                Après avoir présenté la Septante, et étudié la citation d’Amos 9, j’aimerais continuer cette série d’articles sur la Septante avec quelques exemples factuels. Contrairement à l’article précédent, les exemples que je prendrai ici non aucune incidence théologique particulière. Le but est simplement de mettre en parallèle les données fournies par le texte rabbinique et celles fournies par la Septante, et de les comparer avec les textes du Nouveau Testament.

Pour ce faire je prendrai quatre exemple.   

1)    Les généalogies

      Une des différences factuelles les plus importantes se trouve dans la Genèse. Tandis que d’Adam à la venue en Egypte, le Texte rabbinique compte 2238 ans, la Septante en compte 3 624 ans (soit 1386 années d’écart). Cette grande différence s’explique par des âges différents, mais nous pouvons aussi noter la présence d’un personnage qui n’existe que dans la Septante

TableauKainan

        Nous voyons plusieurs différences entre ces deux textes, outre les âges d’engendrement, nous remarquons l’existence d’un Kaïnan dans la Septante. Dans le texte rabbinique, Arpacshad est le père de Schélach et a 35 ans au moment de la naissance de son fils. Dans la Septante, Arphaxad est le père de Kainan, qui est le père de Sala. Arphaxad est donc le grand-père de Sala et a 265 ans (135+130) au moment de la naissance de Sala, ce qui donne donc la généalogie suivante :

Genealogies

 

Si on suit le texte rabbinique, Kaïnan n’a donc jamais pu exister. Or Luc l’inclut dans sa généalogie du Christ :

« fils d’Eber, fils de Sala, fils de Kaïnam, fils d’Arphaxad, »  Luc 3 : 35-36

Luc suit donc bien le texte de la Septante.

2)    Le nombre de personnes descendus en Egypte

          Une autre divergence : le nombre de personnes descendues en Egypte. D’après le texte rabbinique, ils sont 70, tandis que la Septante en compte 75. Notons simplement qu’en Actes 7 : 14, Etienne reprend le chiffre de la Septante.

EgyptePersonnes

3)    La prophétie d’Amos

L’utilisation de la Septante est d’ailleurs confirmée quelques versets plus loin, lorsqu’Etienne cite la prophétie d’Amos :

MolochRemphan

      Nous voyons que le texte hébreu parlait des dieux Sikkouth et Kiyyoun, tandis que la Septante mentionne Moloch et Remphan. Notons simplement que dans le Nouveau Testament, c’est bien Moloch et Remphan qui apparaissent.

4)    Le temps séparant la promesse et la Loi.

          Dernier exemple : le temps séparant la promesse faite à Abraham et la Loi. Dans le texte rabbinique, le séjour en Egypte a duré 430 ans (Exode 12 : 40). Il faut donc rajouter les 215 ans qui séparent la promesse faite à Abraham du début du séjour en Egypte. En revanche dans la Septante, les 430 ans commencent avec le séjour au pays de Canaan (Exode 12 : 40 LXX), c’est-à-dire au moment de la promesse. Or que dit l’apôtre Paul ?

«   Or les promesses ont été faites à Abraham et à sa postérité. Il n’est pas dit: et aux postérités, comme s’il s’agissait de plusieurs, mais en tant qu’il s’agit d’une seule: et à ta postérité, c’est-à-dire, à Christ.   Voici ce que j’entends: une disposition, que Dieu a confirmée antérieurement, ne peut pas être annulée, et ainsi la promesse rendue vaine, par la loi survenue quatre cent trente ans plus tard.  Car si l’héritage venait de la loi, il ne viendrait plus de la promesse; or, c’est par la promesse que Dieu a fait à Abraham ce don de sa grâce. » Galates 3 : 16-18

La Loi est survenue « 430 ans après la promesse ». Paul suit donc, encore une fois, la chronologie de la Septante.

 

9 réflexions sur “Bible et données historiques : l’utilisation de la Septante dans le Nouveau Testament

      • Excellent ce que tu fait, je t’encourage à continuer. Je fais partie d’une équipe qui traduit une nouvelle versions des Écritures. Cela fait plusieurs années déjà que nous sommes dessus, et après bien des recherches, nous avons conclu, que la Septante et plus proche de la nouvelle alliance, que ne le serait les textes Massorètes. En ce moment nous recherchons dans les textes, les déférences entre les deux sources. Encore merci encore, pour ton partage, surtout que tu le fait gracieusement. Fernando

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          • Juste pour te saluer et prendre de tes nouvelles. J’espère que tout va bien pour toi.

            Désolé de ne pas avoir répondu plus tôt, très occupé, très chargé, cela n’est pas toujours évident de trouver du temps, mais pour saluer cela sera toujours possible.

            On a fait beaucoup de recherche et on a trouvé beaucoup de choses, maintenant le temps de l’exposer et de le partager, c’est une autre histoire. Ce que je peux dire, c’est que la Septante est le texte de la première alliance le plus fiable et le plus fidèle aux textes de la nouvelle alliance.

            Cette dernière année, nous avons augmenté le temps consacré aux Écritures. Nous passons pour la plus part, près de 10 heures par jours. Pour ma part, pour l’instant, j’ai laissé la première alliance pour m’occuper des textes de la nouvelle. Vérifier chaque mot, afin de savoir si ils sont bien dans les textes. C’est un travail d’orfèvre, mais bien précieux.

            Bien le bonjour chez toi, que le grand YHWH veille sur toi et ta maison, et que rien ne puisse vous manquer.

            Les Écritures Saintes,
            Fernando

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  3. Hello !

    La Bible des Septante est de plus en plus un sujet qui me passionne. Et je remercie David et à Bibletude.org de m’avoir insufflé cette curiosité. Qu’on le veuille ou non, la pensée et la méditation chrétienne forgée autour de la personne du Christ est liée à la lecture juive de la période intertestamentaire (3e s. av. n. è. au 1er s. de n. è.), dont la LXX est témoin. En effet, plus qu’une traduction avec parfois une différence de vocalisation ou de texte hébraïque, c’est une interprétation qu’on y retrouve.

    Voici un exemple qu’on retrouve dans l’épitre aux Hébreux. Selon l’auteur, personne n’a été appelé « fils de Dieu » parmi les anges (cf. ch. 1). Il démontre ainsi la condition supérieure de Jésus Christ sur les esprits angéliques. Il cite d’ailleurs Dt 32, 43 selon la LXX : « Que tous les anges de Dieu se prosternent devant lui ! » En effet, selon la Bible des LXX, aucun ange n’est appelé « fils de Dieu ». Maintenant, prenez le texte hébreu de Qumran, le passage de Dt 32, 43. Et là, on lit : « Que tous les fils de Dieu se prosternent devant lui ! » Si maintenant, on plaçait cette version-ci dans le ch. 1 de l’épître, un tel raisonnement serait difficile. Je ne dis pas incompatible, mais beaucoup plus dur à démontrer : on s’y perdrait.

    Un peu comme dans certains commentaires dans l’autre blog de David : c’est le souci qu’on retrouve par exemple avec les « fils de Dieu » du temps de Noé. L’erreur est d’appliquer un raisonnement bâti sur la vision septantaine à la lecture du texte hébreu et vice versa. « On ne peut pas dire que les fils de Dieu à cet époque sont des anges, car les anges ne sont pas appelés fils de Dieu (Hébreux 1). » Oui, mais comme on l’a vu plus haut, ce sont bien les « fils de Dieu » du texte hébreu que même l’auteur d’Hébreux appelle « anges de Dieu ». Un raisonnement paradoxal, n’est-ce pas ? D’ailleurs, d’anciens témoins de la LXX remplacent aussi par « anges de Dieu ».

    Généralement, on comprend mal ce que doit être le retour à la « vérité hébraïque ». Considérer que raisonner à partir du texte massorétique est revenir à la vérité hébraïque c’est oublier que la LXX est une traduction… juive pour les juifs (même considérée comme inspirée pendant un temps !), avec en plus leur lecture et leur vision de leur époque — l’attente messianique — en rapport avec la Bible hébraïque. On ne peut faire plus proche des juifs que ça !
    Que le Seigneur vous bénisse !

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    • Bonjour Goutte de rosée,

      Tu soulèves un point intéressant. La question des citations de l’AT dans l’épitre aux Hébreux est vraiment un sujet passionnant.

      Au delà de la Septante, il me semble qu’il faut aussi prendre en compte le Targum. Mais pour l’instant, je n’ai pas encore assez travaillé la question.

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